Tachan tu t’en vas.

Tachan , tu t’en vas…

Besançon, Petit Kursaal, lundi 2 décembre 2008, concert gratuit, présentation de la saison Chanson 2008-2009. Vers les 19-20 heures.

La salle se remplit lentement mais sûrement, pas assez de places, un monde fou. Mais qui passe ce soir là qui attire les foules bisontines?

Deux belles pointures, entre autres, Monsieur Tachan et Monsieur Jamait.

Jamait est arrivé depuis longtemps, il répète, il discute, il rigole casquette sur la tête, cigarette au bec. C’est le parrain de la saison.

Un p’tit bonhomme finit par arriver, courbé, très courbé, l’air fatigué, manteau noir, col relevé, aucune, ou peu de ressemblance avec son personnage sur scène, C’est Tachan! Thérèse, l’une des organisatrices très gentille (elles sont toutes très sympas dans cette association), l’accueille, ils s’embrassent chaleureusement. Il veut fumer une cigarette, la seconde de la journée dit-il, mais où? Théâtre non fumeur, dans les loges? Non pas possible, ils s’en vont. Thérèse me dit « Viens avec nous », avec un clin d’œil amical, elle sait que je veux à tout prix prendre des photos d’Henri. Alors pour fumer ce sera le réfectoire, et Tachan est « ok » pour les photos! Je jubile!

Une question me brûle les lèvres, si je ne la pose pas tout de suite, l’occasion ne se reproduira plus, eh oui plus jamais je l’apprends à l’instant.

-« Vous arrêtez les concerts? » je lui pose la question en souhaitant, vite, vite une réponse négative;

– Oui, c’est terminé!!

– Plus jamais? Et ce soir vous allez bien nous offrir une chanson ou deux? (je reste pleine d’espoir)

– Non, quand je dis non, c’est non, vous aurez le DVD,

– Mais un DVD, ce n’est pas pareil, sur scène, en chair et en os, c’est autre chose

– Ah!, non, je n’ai pas envie de mourir sur scène

Et notre discussion s’arrêtera là.

Tachan sur scène c’est FI-NI !!!!Qu’on se le dise

Ensuite vont se dérouler dans la salle comble du petit Kursaal, le visionnage de son DVD réalisé l’an dernier et ses « adieux à la scène » officiels:

Tachan, chemise orange, gros pull bordeaux, autre gros pull noir qu’il a enlevé, manteau noir, est au premier rang, à l’extrémité gauche de la rangée. C’est drôle, il est dans la salle mais pas du bon côté, pas de son côté habituel, il nous a rejoint: Tachan spectateur !! Tachan dans le public, dans Son public !! Il se regarde, le DVD tourné l’an dernier par Christophe-Monsieur Bitos, « les Zhommes, Le chat de Micky, L’amour et l’amitié, Un piano, La pipe à Pépé, » au piano son fidèle Antoine Millet. Et le public de ce soir chante, applaudit en même temps que le public bisontin de l’an dernier, Tachan est applaudi au cinéma et « en live », on ne peut pas s’en empêcher. Et moi je suis à deux rangs derrière lui, un peu décalée, je peux l’observer, et au lieu de regarder l’écran et le DVD qu’on pourra revoir, je regarde Henri, Henri Tachan, toutes ses chansons il les chante, tout doux dans l’obscurité, incognito….Et moi j’ai envie de crier « Henri, vas-y chante pour nous, en vrai, une dernière fois ».La pudeur est là, qui empêche, qui empêche…

Etrange comme situation, Henri est avec nous dans la salle, et on applaudit un Henri « mis en boîte », une sorte d’hommage à Henri toujours vivant mais plus pour la scène, plus pour nous son public. Après 52 minutes de projection, la lumière se rallume, Christophe-Monsieur Bitos se dirige vers Henri, affalé dans son fauteuil, on ne voit que le bout de son crâne un peu nu qui dépasse du siège. Il se lève, lentement, au ralenti, il ne veut pas monter sur scène, non. Il reste devant nous, prend le micro que lui tend Christophe, et nous explique, nous explique que c’est fini! En résumé voilà ses propos, j’espère ne pas les déformer; mais l’émotion est telle que j’ai beaucoup de mal à bien écouter ou entendre:

 » ça fait quarante ans que je chante, Brel avait dit une fois que même s’il lisait le bottin sur scène, son public l’applaudirait, alors il a décidé d’arrêter. Moi j’avais dit que quand je m’ennuierai sur scène, je ne m’ennuie pas avec vous, non pas avec vous, que quand je m’ennuierai avec moi sur scène, j’arrêterais, c’est arrivé, alors j’arrête. Place aux jeunes.

J’ai fait ce DVD, ça laisse une trace aux miens, ma femme, mes enfants, ceux que j’aime, etc, etc . »

Moment d’émotion à son comble, silence absolu dans la salle, émotion pour Henri, pour Christophe et pour nous son public. Les larmes ne sont pas loin, pour beaucoup elles sont là, impossible de les retenir. Et puis très vite Tachan tend le micro qu’il n’utilisera plus, reprend ses manteau noir et gros pull posés en boule sur son fauteuil du premier rang à gauche, submergé d’émotion, et remonte très vite sans se retourner, les marches du petit Kursaal. Il franchit les deux portes battantes. Voilà c’est fini.

Merci Henri pour tes quarante années de chanson, tes coups de gueule, tes coups de cœur, tes coups d’âmes, merci de Toi.

Reu’sment y a les CDs, y aura le DVD, mais sur scène t’étais unique. Et rien ne remplacera un bon concert, assis au premier rang, quelqu’un interrogé sur le chat de Mickie, quelqu’une sur le mistigri de sa cousine Rebecca, avec les postillons en prime!!!