Alexandre Poulin des mots et des images.

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A  Nantes, à l’auditorium 450 de la Cité des Congrès, un nom pas encore très connu chez nous : Alexandre Poulin, un grand gars barbu qui arrive sur scène en courant depuis le fond de cette grande salle. « C’est la première fois que je commence mon spectacle comme ça, j’ai l’impression que je viens pour me marier et pour dire oui », précise-t-il. Rires et hurlements d’un public assez jeune, quoique, et fanatique. Alexandre va nous confier bon nombre de belles histoires en paroles ou en chansons, accompagné de ses seuls guitares et harmonica (ses musiciens sont restés au Québec). Sont-elles ou non autobiographiques ? Je vous laisse seul juge.

D’abord Vincent, son ami d’enfance, non, son frère d’enfance, fraternité par le mélange des crachats, tout gosses. Alexandre rêvait de devenir chanteur, Vincent de faire le tour du monde en commençant par l’Italie. Après dix ans de silence et d’absence, les frères de crachats se retrouvent : deux étrangers ! Alexandre chante, Vincent travaille pour payer son Audi et sa maison, il n’a le temps de rien et ils n’ont que peu de choses à se dire ! De retour chez lui, notre chanteur écrit un texte sur son ami et, submergé par la tristesse, laisse traîner le travail inachevé sur le comptoir de la cuisine. Quelques mois plus tard arrive une carte… d’Italie ! La fin de la chanson sera écrite en quelques secondes. « Ado je rêvais d’être un grand voyageur/ Pis d’prendre le large quelque part dans ‘brousse/ J’voudrais juste savoir si j’ai mal compris/ Et pis s’il y a quelque chose de moins futile/ Que d’faire une belle job que j’hais/ Pour m’acheter encore plus d’affaires inutiles/ Moi chu rendu au Terminus/ Quelque part en Italie/ Sur la trace d’un p’tit peu plus/ Un p’tit peu plus »

Pendant ces deux heures de bonheur, Alexandre chante, bien sûr, mais il parle beaucoup avec le charme inouï de ce bel accent québécois. Il a été enseignant, un enseignant intelligent au grand cœur. En fin d’études un élève, pour obtenir son diplôme, doit atteindre un score de 62%. A 58%, certains sont rachetés pour franchir la barre fatidique. Il nous dévoile un secret avec une folle tendresse, secret qu’il a tu pendant huit longues années. Un de ses élèves brillant (85% toute l’année) n’obtient que 48% le jour de l’examen. Ni vu ni connu, le prof lui fait faire un bon de 14% pour le conduire au succès. Il savait que le jour des épreuves ce pauvre élève vivait une autre sacrée épreuve, familiale celle-là. Ses parents, en cours de divorce, se retrouvaient au tribunal, pendant qu’il planchait, pour se battre et savoir qui… n’aurait pas sa garde !

Autre excellent moment en chanson cette fois, « L’Ecrivain », moment d’émotion fabuleux. « Mon père gagnait sa vie à l’usine de Camaro/ Pareil comme son père avant lui/ Ma mère faisait des ménages/ Moi j’rêvais d’être écrivain/ Et pis de pelleter des nuages/ Mais il y avait Monsieur Désilet/ Le bon monsieur Désilet/ M’a tendu un crayon banal/ Y a dit « C’crayon là y est magique/ Prends le demain pour l’examen/… Il m’a retrouvé hier soir/ A une séance de dédicaces/ « T’as as toujours pas compris/ Y est dans ta tête ton grand talent »

Puis entre paroles et chansons, les péripéties amoureuses de son ami Sébastien, Alexandre précise avec humour que ce récit n’est pas autobiographique, sa mère aurait été désolée. « Y avait jamais cru en l’amour/ C’était une nouvelle fille tous les deux jours/ Pis de les noter dans son carnet/ Pis elle dit « t’es ben correct »/Pour c’que tu veux, ok, chu prête/ Après le marathon des soupirs/ Il s’est mis à ronfler comme un bûcheron/ Il venait de découvrir l’amour/ Mais en entrant dans le salon /L’amour était parti pour de bon/Avec son carnet pis sa TV »

Des problèmes plus graves et d’actualité quotidienne sont abordés, les ados, la drogue, belle chanson, dure. « Pendant que dans les parcs de Montréal/Des enfants jouent avec des seringues/La p’tite Rosalie dit qu’à soir, c’est elle la reine/Pis le matin quand elle se réveille/Elle a besoin de sa seringue pour le pays des merveilles/… Jusqu’au jour où c’est rendu ta fille/Qui pique dans ta sacoche pour payer ses aiguilles »

Encore plein de belles chansons, chargées d’émotion, d’amour, beaucoup d’amour, c’est ce mot que je retiendrai d’Alexandre Poulin, un chanteur de la vérité, de la vie, la belle, de l’amour des autres. Si Alexandre est au quotidien comme dans ses chansons, alors chapeau, ce doit être un sacré bonhomme !

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3 Comments

  • Henrard Ludo

    Très bel article rempli d’émotions et de sincérité !

  • Pierre Noirault

    Comme tu dis… l’une de mes plus belles découvertes de ces 15 ou 20 dernières années… vivement qu’il repasse en france…

    • Il passe en France entre le 27 juillet et le 2 août au festival de Barjac, Chansons de Parole.

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